L’anniversaire des cent premiers jours du mandat de Joe Biden a coïncidé avec l’anniversaire du génocide arménien, perpétré en avril 1915 par l’armée turque. Il a été marqué par la reconnaissance officielle de ce génocide par le nouveau chef de la Maison Blanche, énième et convaincante manifestation d’un changement de paradigme à Washington depuis le départ de Donald Trump qui n’avait que faire du passé et de ses symboles. Avec Joe Biden, aurons-nous droit au meilleur de l’Amérique, après les années Trump qui en avaient été le pire ?
Économie et social : feu vert à la taxation des GAFA, Google, Amazon, Facebook et Apple, ces multinationales américaines qui sont en train de racketter la planète entière ; feu vert à l’instauration d’un impôt minimum sur les bénéfices des entreprises pour limiter les délocalisations vers les paradis fiscaux ; lancement d’un plan de relance colossal directement inspiré du New Deal de Franklin Roosevelt, avec redistribution sociale et un grand programme de modernisation des infrastructures de base ; relance de l’Obamacare, cette « sécurité sociale » tant décriée par l’Amérique des conservateurs ; augmentation de l’impôt sur les entreprises pour son financement.
Environnement : retour toutes affaires cessantes au sein des accords de Paris que Donald Trump avait quittés, et affichage d’objectifs de réduction des gaz à effet de serre ambitieux ; arrêt du chantier de l’oléoduc qui assurait leur débouché aux sables bitumineux du Canada, forme la plus polluante de l’exploitation pétrolière dans le monde.
Affaires étrangères : coup de barre salutaire contre le régime saoudien, en soulignant l’implication du prince héritier d’Arabie Saoudite MBS dans l’assassinat du journaliste Khasoggi, et retrait de la rébellion Houthi du Yemen de la liste des organisations terroristes où Donald Trump l’avait inscrite juste avant de quitter la Maison Blanche ; coup de barre salutaire également contre le régime d’Erdogan en Turquie, avec la reconnaissance du génocide arménien, ce qui soutient le peuple arménien menacé d’épuration ethnique au Nagorno-Karabakh ; et aussi une opposition claire et nette à l’abandon des Kurdes par Donald Trump en Syrie et en Irak ; retour à une relation apaisée avec l’Union Européenne pour faire front commun vis-à-vis de la Chine (dossier des Ouïgours) et de la Russie (affaire Navalny), etc. ; retour aussi à la table de l’accord sur le nucléaire iranien que Trump avait renversée contre l’avis de tous. Etc.
Une des erreurs manifestes de Donald Trump est donc d’avoir surnommé Joe Biden « sleeping Joe », Jo l’endormi, dans les tweets méprisants de sa campagne perdue. Joe Biden ne dort pas et il utilise tous les ressorts de changement que sa victoire a permis.
Dans ce contexte renouvelé quant aux positions de la première puissance mondiale, le monde respire un peu. Notamment, le dossier crucial de la lutte contre le réchauffement climatique apparaît moins désespéré désormais, alors que le déni total de Donald Trump avait menacé de tout compromettre. L’Europe aussi a rehaussé de façon consistante ses objectifs, tandis que la Chine, étouffée par les fumées de son charbon, en fait de même.
Tous se retrouveront en Écosse en septembre prochain pour le futur sommet sur le climat, le premier qui sera tenu en présence de Joe Biden. Tout ceci dans une Écosse qui, le 6 mai prochain, devrait accorder une large victoire aux partis indépendantistes et au SNP de Nicola Sturgeon.
On observe ainsi une sorte « d’alignement des planètes » qui donne quelques raisons d’espérer. Pourvu que ça dure ! •